Près de 130 futurs maîtres sont privés de formation

Pour la rentrée, seuls 59 candidats sur 189 pourront intégrer la seconde année de l’Institut de formation des enseignants.

Et encore une année à patienter! 130 étudiants de l’Institut universitaire de formation des enseignants (IUFE) pour le secondaire vont devoir ronger leur frein: ils viennent d’apprendre qu’ils ne peuvent toujours pas terminer leur formation à la rentrée. Sur 189 candidats désirant entrer en deuxième – et dernière – année du cursus, seuls 59 ont été admis. Certains ont terminé leur première année depuis deux, voire trois ans et attendent de pouvoir finir leurs études et obtenir un emploi. La conseillère d’Etat en charge du Département de l’instruction publique (DIP), Anne Emery-Torracinta, le reconnaît: «Ce système est devenu fou.»

Le problème n’est pas nouveau. C’est seulement un énième épisode d’une saga qui s’éternise. La principale tare de cette formation des maîtres du secondaire – celle du primaire, elle, fonctionne bien – est que les étudiants se retrouvent coincés à la fin de la première année car, pour passer en deuxième, un stage à 50% est obligatoire. Or, ces places, délivrées par le DIP, sont rares.

Stages limités par le budget

Pour éviter ces blocages, l’Université a pourtant pris des mesures: depuis quelques années, elle ferme l’entrée de l’IUFE à certaines disciplines, comme la biologie ou l’histoire. L’an passé, elle a instauré un numerus clausus et on pouvait dès lors imaginer que les sélectionnés auraient la garantie de pouvoir terminer leur formation. Pourtant, sur ces 69 étudiants qui ont commencé l’IUFE en 2014, 20 n’ont pas obtenu de stage. Les places ont été distribuées en maths et en allemand, plus une poignée en arts visuels, en gym, en latin et en physique. «C’est scandaleux, on nous a pourtant répété que le numerus clausus nous assurait une place de stage!» déplore Céline*, étudiante en première année d’anglais.

Pourquoi ces étudiants restent-ils sur le carreau? «Les estimations des stages sont le résultat d’une projection effectuée en 2013-2014 pour des places mises à disposition par le DIP pour l’année suivante, indique Isabelle Mili, directrice de l’IUFE. Pour éviter l’engorgement entre la première et la deuxième année, il nous fallait anticiper! Mais la gestion des établissements – qui comporte notamment des éléments variables comme le nombre d’élèves, l’organisation des postes selon les vœux des enseignants, les remplacements de personnes en congé annuel ou maladie – et les restrictions budgétaires intervenues cette année ont modifié la donne.» Du côté du Département de l’instruction publique (DIP), on renvoie la balle à l’Université. «L’IUFE a assuré aux étudiants de première année qu’ils obtiendraient un stage, mais c’est un engagement qu’il ne pouvait pas tenir. On ne peut pas prévoir le nombre de stages 18?mois avant la rentrée! relève Anne Emery-Torracinta. Et on ne peut pas inventer des besoins, surtout dans le contexte budgétaire actuel. L’IUFE a trop formé sans tenir compte des besoins du terrain.»

Comment expliquer que le DIP fournisse si peu de stages? «Les places de stages sont attribuées en fonction des besoins d’emploi du DIP, soit une fois que tous les enseignants nommés ont obtenu leur poste, répond la magistrate. Or, nous avons dû faire des économies pour le budget 2015 et 25 postes au cycle ont été supprimés. 25 temps complets équivalent à 50 stages car ce sont des 50%…»

Des volées sacrifiées?

Les «recalés» de cette année viennent donc grossir les rangs des futurs maîtres en attente. Difficile d’imaginer qu’on parviendra à résorber ce contingent de 130 étudiants… Doit-on parler de volées sacrifiées? «Ce contingent m’inquiète et je souhaiterais qu’une solution transitoire soit trouvée», concède la magistrate. En attendant, les futurs maîtres s’impatientent. Carole*, 34 ans, qui s’est lancée dans cette formation pour se réorienter professionnellement, est «dégoûtée». «On est des pions! On vient de nous aviser que nous n’aurons pas de stage, qu’allons-nous faire à la rentrée? Enchaîner les remplacements, et continuer à vivre dans une situation précaire? J’aimerais savoir si cela vaut le coup d’attendre pour finir cette formation!» Marc* attend depuis trois ans d’intégrer la deuxième année. «J’ai du mal à trouver des remplacements dans ma branche car il y a peu d’heures d’enseignement. Alors je travaille en parallèle à la Migros mais mon contrat vient de se terminer. Je n’ai rien pour l’an prochain, une telle inconnue, c’est invivable.» *Nom connu de la rédaction (TDG)

(sources : Tribune de Genève)

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